Poèmes de Jean Lorrain

Pierre de Bréville (1861-1949)

Trois Mélodies
Pour voix moyenne (ou haute) et piano
Partition

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La Mort du lys
La Belle au bois
La Petite Ilse


La Mort du lys
Presque lent, très simplement à 4/4
Do Majeur (Do3-Mi4)

Une grâce étrange et navrante
Est dans le blanc trépas des lys,
S’effeuillant sur l’eau transparente
Des porte-bouquets trop remplis.

Dans leur étroit cercueil de verre,
Leurs beaux cadavres éclatants
Ont le charme auguste et sévère
Des vierges mortes à vingt ans.

La souffrance les divinise…
Leur élégance et leurs pâleurs
Dans le grand cornet de Venise
Semblent un martyre de fleurs.

Cette tige, qui pleure et saigne
En parfumant de son regret
Et le vase et l’eau, qui la baigne,
Absout ses bourreaux en secret.

Le mystère de ce calice,
Inconnu même aux papillons,
Dans l’enivrement du supplice
S’entrouvre aux yeux, pleins de rayons.

La mort aux lys fait une gloire,
Couronnés de parfums subtils,
Leur forme est celle d’un ciboire,
Leur nimbe est dans l’or des pistils ;

Et, s’effeuillant au bord du vase
Dans un chaste et calme abandon,
Leur agonie est une extase
Et leur parfum est un pardon.

La Belle au bois (pdf page 9)
Pas vite à 3/4
Fa Majeur (Ré3-Sol4)

La belle au bois, qu’a réveillée
Le beau prince franc Clodomir,
A préféré se rendormir
Dans la ronce et l’herbe mouillée:

Au sinistre oubli résignée,
Plutôt que vivre et que souffrir,
La belle a dit à l’araignée :
« Tisse tes toiles, araignée,
« L’ombre est douce à qui va mourir. »

Elle a mieux aimé, la charmante,
Reprendre son rêve enivrant
Que vivre en notre âpre tourmente.
Oh ! les grands iris odorants,
Les grands iris noirs de ténèbres
Au seuil des sept donjons funèbres
De la princesse au bois dormant.

La Petite Ilse (pdf page 14)
Lent à 4/2 avec vocalises
Ré Majeur (Ré3-Solb4)

Pleurez, la petite Ilse est morte.
On l’a mise en un batelet
Tendu de drap noir, à l’ourlet
Brodé d’argent, comme on en porte
A la cour pour le deuil du roi.

Le cadavre d’Ilse a bien froid,
Ilse a les deux lèvres gercées
Et les paumes des mains glacées,
Toute raide en son lit étroit.

De grands oiseaux, dans les ténèbres,
Tournoient avec des cris funèbres
Autour du cercueil. Un muet
Veille le corps blème et fluet,
Et la barque, entre les deux rives
Glisse et descend à la dérive.


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